Thursday, March 30, 2006

shoop, shoop, shoop de-lang a-lang

Entre l'oisiveté vacante presque ostensible et le vent de révolte qui souffle comme jamais, rien de nouveau à l'est. La vie suit son cours et la moselle déborde. J'aime cette pluie. Cette sensation sur le pont des Morts, tout le monde se cache, les gens préférent l'air chaud et saturé de l'été. Mais moi, je dois dire que j'apprécie.

Il y a une petite église pas loin du centre ville, place de la comédie, divine comédie, qui s'étire sur la Moselle, les arbres y sont verts, les pierres lisses, les couleurs un peu ternes, l'endroit est romantique et sent une humidité débordante de saveurs, voila, mon cadre lyrique est posé. J'y vais un coup de temps en temps flaner une heure le samedi matin. L'endroit est ravigotant, une brise vaguement océanique balaye généreusement ce petit coin.

M. me semble vieux et réac, les pierres de mon lycée me font d'ailleurs la même impression. Il porte des vestes à rayures verts moutardes, porte des pantalons mal coupés noirs-bleus marines qu'il associe dans un délicieux ragoût de mauvais goût avec des chaussettes blanches et des mocassins noirs. Il se dandine devant un public aquis, blague, s'arrête, continue, le spectacle est d'un ennui salvateur pour mes nuits de sommeil, qui se sont vues sucrer les assedic du repos depuis longtemps. M. râle contre les socialistes/communistes de tout poil, ces feignants, la racaille anarchiste du pays, il pense que tout est dans le travail. Il prend un petit rictus craquant, un faux accent sarcastique qu'il maîtrise depuis toute sa vie, ne cherchant même plus à être un tant soi peu objectif, il débite. Et se dandine.

En m'endormant, je suis parfois saisi de foutues crises de paranoïa, j'imagine des choses incroyables, des noyades dans le mercure, 150 watts de décibles hurlants qui jaillissent du poste, un étouffement, c'est très bref et très réaliste. Dans l'ombre, je ris un coup et je me rendors immédiatement.

Wednesday, March 29, 2006

[99 PROBLEMS]

When denial is the best alternative


William Klein

Thursday, March 23, 2006

[PROTECT YA NECK]

J'ai mal à la gorge et je suis littéralement aproductif. A part penser à une vie pour la suite, rien, coincé entre la tutelle parentale et la fin de lycée un peu glauque, je-m'en-foutiste sur les bords et sans vraiment d'ambitions, j'ai une vie calme, mais ça changera. Je veux des fontaines de bière, de drogues, je veux du bon son, je veux des bons bouquins, je veux avoir des trucs à dire. Et sortir de la médiocrité quotidienne, oh oui, et au galop. Loin des clichés niais et largement ressassés, je pense que je veux aller voir ailleurs. Metz, ville fleurie. Fleurie aux couleurs des nouveaux sacs ultra-fashion Hello Kitty, des étudiants en grève, et du sourire affreusement faux du gros Rauch. Mais c'est partout pareil. Alors tant pi, juste pour y croire une demie heure et pour être seul.

Je pense que c'est la raison principale
qui m'a poussé à devenir
écrivain: je veux taper
n'importe quand et dormir
quand ça me plaît
nom de Dieu

Charles Bukowsky - Le ragoût du septugénaire.

Wednesday, March 22, 2006

[HOW MANY DRUGS DOES IT TAKE TO FIND SOMETHING TO SAY ?]

...comme le dit le très cher Adam Green dans son nouvel album. Tout ça pour parler de...


"Le coffre de la voiture ressemblait à un labo ambulant de la brigade des stupéfiants: nous avions deux sacoches d'herbe, soixante-quinze pastilles de mescaline, cinq feuilles d'acide-buvard carabiné, une demi-salière de cocaïne, et une galaxie complète et multicolore de remontants, tranquilisants, hurlants, désopilants... sans oublier un litre de tequila, de rhum, un carton de Budweiser, un demi-mitre d'éther pur et deux douzaines d'ampoules de nitrite d'amyle."

Gare aux fesses, intellos du dimanche et autres lecteurs de Télérama, Mr Thompson va vous conter l'histoire du rêve américain, ou comment exploiter toutes les possibilités de la vie occidentale dans le genre débauche, trip et compagnie. Ce bouquin autobiographique est un vaste assemblage de 200 pages tout de même, de shoot d'acides et de crises de paranoïa, donc d'office, n'essayez pas de trouver une morale, une leçon où quoi que ce soit, ça serait parfaitement ridicule. Déja, il faut commencer pas trouver le scénario, ce qui n'est aux premiers abords pas évident du tout. Un journaliste de chez Rolling Stones part à Las Vegas pour couvrir une quelconque course de motos dont tout le monde se branle, avec son avocat, beaucoup de drogues et beaucoup de crédits. POINT. Le concept de l'écriture en l'air, sans but apparent, si ce n'est que de satisfaire une certaine glouttonerie verbale est naît. Le mec ne se retourne pas, il écrit, si c'est bon, tant mieux, sinon, tant pi, il écrit comme il roule et comme il vit. Bien sûr, on aura toujours les trois faces de culs rattatinés du fond de la Grande Académie Française qui nous soufflerons leur science aigrise et mal odorante du classique, et nous regarderons l'oeil déçu "je croyais en toi". Fais-toi sodomiser par Montaigne, vieille branche !

Mais ce bouquin est plus que la synthèse avinée d'un voyage, c'est vraiment l'American Dream side Rock & Roll, le point d'orgue d'une culture populaire cheap qualifiée par les grincheux de sous-littérature, (et merde, je viens de mettre la moitié de ma jambe dans le marais de l'intellectualisation), une écriture bien spécifique donc, qu'on n'a pas en France, et qu'on aura jamais.

Friday, March 17, 2006

[SPIRITS DRIFTING]







à voir ce soir expo afric'art sur arte à 22h10, je sais pas ce que ça vaut, mais les oeuvres sont sympas

Wednesday, March 15, 2006

[FUN HOUSE]

ça sent un peu le cramé en ce moment, mais on finit par s'y habituer...C'est pas déplaisant au début, les jeunes, les tracts qui jonchent le sol, les barricades sur la fac, ça a un petit coté festif, une lueur de truc sympa à l'horizon qui pourrait bien nous tirer du grand marasme quotidien. Mais non, bien sûr, ça a capoté en un gros truc pathétique, les petits gauchos utopiques - des crapauds d'idéal comme dirait Céline - d'un coté, contre le troupeau bêêêlant de la droite, les deux se dévisageant un sourire au coin, l'air de dire, le con, il a rien calé à la réforme, alors que moi, si. Les gauchos doivent prendre de l'utopie en plaquettes tous les matins pour y croire encore, à leur beau monde égalitaire. Remarque, la droite étudiante a été frappée du syndrôme inverse, se rabattant encore plus à droite en réaction à la gauche, acquiescant tous et n'importe quoi juste pour faire chier les autres. Et moi, au milieu de tous ces gravats réformateurs ou réactionnaires, va savoir qui est qui, je me drape dans une apathie de velour, je souris à tout le monde sans être trop hypocrite quand même, stooges en fond, la vague impression de naviguer sur un autre fleuve, coulant vers un inconnu complet à la recherche de trucs nouveaux.

Sunday, March 12, 2006

[PACIFYING JOINT]


Fêtes sanglantes & mauvais goût, compilation d'articles de Lester Bangs est un "truc" véritablement, qui traîne sur le bureau ou a coté du lit, vaguement déplaisant, une couverture hideuse tout droit sortie de quelconques trips acidifiés des sixties -noir/rose sur jaune sur bleu fluo, en bref un monument de bon goût- tellement moche qu'elle en a interpelé ma pauvre mère passant par là. En dehors de l'aspect du bouquin, la plume de l'homme se révèle incroyable. John Morthland, un ami et collègue de Bangs capte bien le truc "Pour avoir partagé un bureau avec Lester, je me souviens être resté assis-là, très impressionné, à le regarder écrire, littéralement, aussi vite qu'il pouvait taper. Bien entendu, cela donnait parfois des textes médiocres, ou aussi bien exceptionnels, et je peux le revoir aussi affalé sur sa machine à écrire, cherchant quoi dire ensuite, mais surtout comment plier le langage à sa volonté." Et en effet, sur certains passages, l'écriture de Lester Bangs se retrouve véritablement déliée, les sensations, les émotions et les idées sont mises à nues via une gymnastique instable et inquiètante qui les auraient assommées en vol pour les recoler ensuite bien soigneusement sur la feuille, le tout restant cohérent. Bangs est l'ultime témoin de la grande fanfare pétarrrradante et assourdisssssssante qu'est la culture rock- témoin, mais pas dupe - sa littérature est saignante et grinçante. Terriblement agaçante aussi, le bonhomme jugeant un disque nullissime, quand deux semaines plus tard, il reprend tous ces arguments pour en faire un chef d'oeuvre, et nous au milieu, un air niais et ravi sur la face et l'envie de tordre ce foutu bouquin pour qu'il crache défininitivement quelques uns de ses secrets et qu'il vomisse sa médisance crasse, pour triompher de cette couverture ignoble, pour le presser comme une éponge et boire les quelques gouttes du substrat jaunâtre et accariatre d'une époque que nous, les-sales-morveux-aux-dents-blanches des années 2000 abrutis à coup de ciblage marketing en tout genre, on n'aura surement plus l'occasion de vivre, bardés de ceintures de diplômes pour aller à la guerre de l'emploi, costard sur le dos, sourire large angélique, scénic au garage, une femme 2 enfants, consommateur consommé tirant sur le Bourgogne une fois tous les dimanches, sur sa nana tous les 3 jours et pi merde je bande plus, alors comme le Bourgogne, de toute façon, ça fait longtemps que j'ai plus pris mon pied au lit, elle est gentille mais dix ans de vie commune, ça commence à faire sec et tout le blablatage de rigueur...à juste 30 ans, 40 ans comme ça et c'est la retraite, ouf, on est sauvé de la vie. Le constat est bien caricatural, mais pas faux néanmoins, je me fais chier, on se fait chier, nous nous faisons chier dans la vie concrète, un peu obligé de vivre par procuration dans les années sombres de fin de lycée, et n'ayant pas les couilles de claquer la porte à la gueule de tout ce bel enseignement par la suite. Tout ça pour revenir d'une digression du fond du puit à Lester Bangs, le whap-pam-pam des machines à écrire, mort au darvon dans la trentaine, laissant tout son petit monde sur le cul face à de rougeoyants petites pépites, comme ses soirées avec les Angels, ses hivers dans la cambrousse, sa jeunesse, mais aussi ses interviews drôlatres avec un Lou Reed cliniquement mort-vivant, concervé dans une bouteille de Scotch, un Hendrix lui bel et bien mort, portant au pinacle un Beefheart, une Patti Smith ou une Nico, au bûcher les autres, Jagger boiteux et consort, un ragoût de tout dont on se crame joyeusement la langue. Merci pour tout mec.

Saturday, March 11, 2006

[LIKE A DIRTY FRENCH NOVEL...]

Aujourd'hui, le ciel était trop bas et la journée trop vide et brouillone, je me suis recouché au milieu de l'après midi, sur les bons conseils libertins du Marquis et le pour l'instant décevant "Hell's Angels" de Hunter Thompson, peut être dû à la traduction. Et ce soir, aucune raison particulière de me relever, si ce n'est louquer un coup mon agenda et me dire que non, je ne ferai rien ce soir. Encore un jour sacrifié sur l'autel du rien du tout. Tant pi.

Wednesday, March 08, 2006

[TOUCHE PAS AU GRISBI, SALOPE !!!]


Wu Tang Clan - The W
Missill - Mash Up
Gangstarr - Moment Of Truth

illustration Marie Meier

Sunday, March 05, 2006

[PLONGEE DE GLACE]

"Mais si ! qu'il a répondu. Que j'en ai du courage ! Et sûrement bien autant que toi !... Seuleument moi, si tu veux tout savoir...Tout absolument...Eh bien, c'est tout qui me répugne et qui me dégoûte à présent! Pas seuleument toi !...Tout!...L'amour surtout !...Le tien aussi bien que celui des autres...Les trucs aux sentiments que tu veux faire, veux tu que je te dise à quoi ça ressemble moi ? ça ressemble à faire l'amour dans des chiottes ! Tu me comprends-t-y à présent ?...Et tous les entiments que tu vas chercher pour que je reste avec toi collé, ça me fait l'effet d'insultes si tu veux tout savoir...et tu t'en doutes même pas parce que c'est toi qui est une dégeulasse parceque tu t'en rends pas compte... Et tu t'en doutes même pas non plus que tu es une dégoûtante !...ça te suffit de répéter tout ce que bavent les autres...Tu trouves ça régulier...ça te suffit parcequ'ils t'ont raconté les autres qu'il y avait pas mieux que l'amour et que ça prendrait avec tout le monde et toujours....Eh bien moi, je l'emmerde leur amour à tout le monde !...Tu m'entends ? Plus avec moi que ça prend ma fille...leur dégeulasse d'amour !...Tu tombes de travers!...T'arrives trop tard ! ça prend plus, voila tout!...Et c'est pour ça que tu te mets dans les colères !...T'y tiens quand même toi à faire l'amour au milieu de tout ce qui se passe ?... De tout ce qu'on voit ?... Ou bien c'est-y que tu vois rien ? Je crois plutôt que tu t'en fous !...Tu fais la sentimentale pendant que t'es une brute comme pas une...Tu veux en bouffer de la viande pourrie ? Avec ta sauce à la tendresse ?...ça passe alors ?... Pas à moi !...Si tu sens rien tant mieux pour toi ! C'est que t'as le nez bouché ! Faut être abrutis comme vous l'êtes tous pour pas que ça vous dégoûte...Tu cherches à savoir ce qu'il y a entre toi et moi ?...Eh bien, entre toi et moi, il y a toute une vie...ça te suffit pas des fois ?"

Céline, Voyage au bout de la nuit

Friday, March 03, 2006

[HOW TO BUILD A SUPER COMPUTER]


New York est plus qu'une ville, c'est une entité qui vibre, vivante et colorée des rêves de chacun. Chacun vient dans l'illusion de trouver son paradis, mais ce paradis n'existe pas, ils se le construisent. New York est une armature fragile à tous les délires fumeux et fatigués des hommes: on y voit ainsi proliférer des parcelles d'illusion à perte de vue. On y refait le mafia chic de 1930 autour d'un plat de spaghetti, le début du rock underground, les soirées folles du Bronx battle de djs et lyrics à foison et on y fait du neuf, synthèse de l'ambiance ou tout simplement autre. Et entre, du métal et du béton. Les locaux se retrouvent pris dans ce ronronnement brassant formes et couleurs, nageant sympathiquement dans cet éjaculat des restes du monde, spirituellement et donc artistiquement incroyablement fertile. Une ville en éréction totale depuis une belle plombe, ça a laissé le temps aux bases de se laisser envahir par la folie des voisins, ne laissant qu'une grosse touffe aujourd'hui indémélable. Un sac plastique, ultime trace de la civilisation, vole dans les rues de Brooklyn. Il est comme pas mal de gens, il ne sait pas où il va, au grès du vent, il se pose et repart. Paradoxalement, New York est le premier lieu de résistance à l'hégémonie de la société de consommation américaine, on pourra lui faire bouffer autant de billets tartinés du consumérisme crétin actuel qu'on voudra, les boyaux entrelacés et suintants du vrai New York digéreront tout calmement, ronronnant, Manhattan n'étant qu'une plaie verdâtre sans âme.


Ou alors, tout a été recouvert et je me fais des illusions. Le doute m'habite.

Wednesday, March 01, 2006

[THE GREATEST]

"half of it is innocent
the other half is wise
the whole damn thing makes no sense
I wish I could tell you a lie
hey, come here
let me whisper in your ear"








On peut dire que les albums de Cat Power sont brouillons et pleurnichards, un peu grandiloquents et faussement modestes, mais il faut quand même être con. The Greatest, dernier opus, est profond et d'une nostalgie sincère et touchante, comme un vieux blues un peu sali et terni par le temps, qui regrette sur un bord de route pluvieux, les belles années. Chan Marshall est comme ça surement, un peu paumée, un peu nostalgique de quelque chose qu'elle ne connait peut être même pas, attendant quelque chose qui ne se présente pas. Même pas trop de drogues, de pétages de cables, de frasques répétées dans tous les torchons bons marchés, nan, ça serait trop simple, on a déja des brouettes de Doherty&co... juste une petite tristesse discrète, corrosive et monotone, distillée sur son visage et dans sa voix, Chan Marshall est si belle et sensuelle. Certaines chansons sont un peu dans la lignée de Chelsea Girls de Nico, la voix grave en moins, une alchimie peut être aussi avec un Neil Young palôt, un zeste de gospel (empty shell) , il se dégage une poèsie pesante, une atmosphère de neige fondue, de pluie sur l'été, un petit sourire triste au coin. Je ne vais pas parler des studios Ardent à memphis où a été fait l'album, ni des musiciens qui l'accompagnent, j'en sais rigoureusement que dalle. Mais l'aspect minimaliste un peu sale et tout à fait posé de l'instrumentation va très bien avec la voix timide et trébuchante mais pénétrante de Chan. A écouter, à essayer au moins.